LE VENT SE LÈVE… (Tombeau de Maurice Ravel) (2014)

à Tristan MURAIL - Editions Leduc
harpe, flûte, clarinette, quatuor à cordes - durée : 14’
commande : Etat pour l’Ensemble Sillages
création : 20 février 2014, France, au Quartz de Brest et 7 mars à l’église Saint Merry, Paris.
Ensemble Sillages, Renaud DÉJARDIN (direction)

 

Note de programme

Ce titre est un hommage au Cimetière marin de Paul Valéry qui m’avait tant bouleversé alors que j’avais vingt ans et que je décidais d’abandonner mes études scientifiques pour commencer l’étude de la musique. Avec cette œuvre, j’ai voulu aussi rendre hommage à un compositeur contemporain de Paul Valéry : Maurice Ravel. Par admiration pour son œuvre, j’ai repris la nomenclature si particulière de l’une de ses partitions, Introduction et Allegro où la harpe a un rôle quasi-soliste, dans un ensemble comportant en tout sept musiciens.

Le vent se lève... se compose de trois parties et d’une coda. Les deux premières parties s’enchaînent sans discontinuité.

La première déploie une très longue trame sonore évolutive aux cordes. Elle débute par des sons harmoniques piano, sorte de « grains de lumière » dans l’extrême aigu. Ensuite, très progressivement, elle se transforme dans le médium en une « polyphonie flottante », avant de s'enfoncer peu à peu dans le grave fortississimo. Sur cette texture des cordes, se superposent les trois autres instruments avec des motifs courts qui prendront de plus en plus d’ampleur en se développant sous la forme d’arborescences.

La deuxième partie nous plonge dans un embrasement général où le timbre habituel des instruments disparaît totalement, au profit d'une texture bruiteuse complètement amalgamée. Dans ce monde très étrange, comme une coulée de lave en fusion se pétrifiant peu à peu, la harpe, la flûte et la clarinette réapparaissent sur une texture continue des cordes, évoquant la couleur de la terre. A ce moment de la partition, j’imbrique l’un dans l’autre deux clins d’œil : le premier à Tristan Murail, dédicataire de l’œuvre, avec une suite d’arpèges à la harpe conçus à partir d’un spectre harmonique, le second à Maurice Ravel avec le motif en tierces à la flûte et à la clarinette que l’on entend dès le début d’Introduction et Allegro.

La troisième partie commence en reprenant certains éléments du début de ma partition, puis se fait entendre un nouveau motif. Il est écrit sous la forme de deux ostinatos développés différemment, l’un aux cordes, l’autre à la harpe. Par intermittence, la flûte et la clarinette se superposent à cet ensemble avec des figures musicales en forme de lents mouvements de vagues de plus en plus intenses.
Une courte Coda fait jaillir un tourbillon à la fois violent et véloce d’une multitude de « figures rubans » pour s’achever dans la spirale ascendante d’un vent léger...

3A

 

Écouter
Ensemble Sillages, Renaud DÉJARDIN (direction) - 2014, Paris, église Saint Merry

 

Article de presse

Michèle TOSI, ResMusica.com, 7 mars 2014

"Sous la direction exemplaire de Renaud Déjardin, l’ensemble Sillages donnait cette fois en création parisienne Le Vent se lève. Si l’on reconnaît immanquablement le style du compositeur, la nouvelle œuvre d’Allain Gaussin – qui fait référence ici au poème bien connu de Paul Valéry Le Cimetière marin – relève d’une liberté de geste et d’une séduction sonore accrues : sans doute par la richesse du dispositif qui ajoute, aux instruments de prédilection du compositeur, la harpe pour laquelle il a encore assez peu écrit. L’écoute est d’emblée captivée par la constellation lumineuse du début idéalement réverbérée par la voûte de Saint Merry. Le traitement des cordes dont les sonorités se répandent en nuages de sons crée de véritables illusions acoustiques. Flûte, clarinette et harpe s’enroulent ensuite dans un même mouvement spiralé pour décrire des trajectoires vertigineuses dans une fluidité et une transparence étonnantes. C’est dans la liberté du geste dessinant ses figures dans l’espace que va s’achever la pièce, aspirée par le souffle d’un vent léger. "


___ haut de la page