IRISATION-RITUEL (1980)

pour Arielle - Editions Salabert
soprano solo, flûte solo, récitant (ad libitum) et orchestre - durée : 29’
poème Allain GAUSSIN, extrait de L’attente…L’absolu, éditions d’écarts, Paris 2004
3(3pic).3(cor ang).3(clB).3(cbn)-4.3.3.1-4 perc, 1pno-crd(14.12.10.8.6)
commande : Etat pour le Festival de Metz
création : novembre 1980, France, Festival de Metz
Orchestre philharmonique de Lorraine, Peter EOTVOS (direction)
Yumi NARA (soprano), Pierre-Yves ARTAUD (flûte)

 

Note de programme

La structure générale est composée de cinq grandes parties.

Première partie - Prologue - très long solo de flûte basse de caractère méditatif, gravissant lentement toute l'étendue de l'instrument, du grave à l'extrême aigu.

Deuxième partie - description de la lumière en tant que phénomène purement physique, avec ses particules et ses multiples mouvements ondulatoires. Cette partie justifie le mot "Irisation" du titre par l’évocation très colorée que prend la décomposition de la lumière à travers un prisme.

Troisième partie - confrontation de trois personnages types :
• le premier (aux instruments graves de l'orchestre) pose des questions existentielles, il est inquiet, anxieux, angoissé.
• le second répond au premier de façon calme et sereine par un choral très linéaire chanté par la soprano, doublée à l’unisson aux cors et aux violoncelles ; ce choral est harmonisé dans l'aigu (aux "bois").
• le troisième (à la flûte soliste) est instable et oscille entre les deux premiers.

Quatrième partie - c'est la partie la plus développée. Sa construction repose sur l'idée d'une inversion de tension entre la soprano et l'orchestre (opposition ligne / masse). Si au début, la soliste impose sa tension par des phrases rapides, très ornementées, quasi-mécaniques, celles-ci évoluent avec des valeurs rythmiques de plus en plus longues et des lignes mélodiques de plus en plus épurées. A l'inverse, l'orchestre se charge progressivement en multipliant ses harmonies, comme une cellule biologique en état d'expansion. La dilatation devient telle, qu’à l’extrême fin de cette partie, la matière musicale éclate subitement ; à ce moment, l'orchestre est traité comme un matériau brut que l'on peut casser, modeler ou tailler, comme le ferait un sculpteur avec un grand bloc de pierre.

Cinquième partie - lente remontée vers la lumière. Sous la violence de la dernière explosion, tous les matériaux s’effondrent brusquement dans l’extrême grave de l’orchestre. Commence alors une remontée extrêmement lente des registres (avec au début l'ascension des percussions métalliques) qui s’achèvera à la fin dans l’extrême aigu, vers la lumière. Dans cette lente ascension, vers le milieu, se superpose un hymne à l'amour (exprimé par les deux solistes) avec des contrepoints enchevêtrés ; cet hymne justifie la dédicace. L'œuvre s'achève en reprenant les éléments musicaux de la 2e partie, dans un climat de grande sérénité : - appel à la Lumière - contemplation - plénitude -

3A

→ Pour une analyse détaillée, se reporter au livre d’entretiens avec Allain Gaussin, écrit par Michèle Tosi Musique de l’imaginaire, éditions MF, Paris 2014

 

Poème

Décharge de l'effort fossile
Geste articulé loin des forces acides
Poser le pied par le sang
    Cri
    Souffle à vif
    Io !
Intervalle réciproque jeté au gouffre du regard

Subitement
  Bousculé
    Rétréci

         Ecart en relief

Jeu du recul interpolé
L'acuité pénètre en lueur inouïe

  Brèche
    Fissure
      Balancement réciproque ajouré
        Irisation plénitude secouée de la mémoire

Au travers glisse l'immobilité

         Miroir d'incertitude
         Zénith digital
         Transparence probable

      "L'instant percuté saigne"

3A

→ Poème Irisation-Rituel II, p. 37 in L'attente... L'absolu, Allain Gaussin, Paris, 2013.
Aucune citation, en partie ou totalité, ne peut se faire sans demande d'autorisation auprès des éditions d'Ecarts

 

Écouter l'enregistrement intégral
Nouvel Orchestre Philharmonique , Irène JARSKY (soprano), Pierre-Yves ARTAUD (flûte), Peter EÖTVÖS (direction) - 1995, CD Salabert Allain GAUSSIN.

 

Articles de presse

Harry HALBREICH, Revue Crescendo, Jeune musique française Joker, 1995

" (…) Allain Gaussin est un visionnaire épris de rêve et de fantastique, un poète de grand talent (et l'expression verbale est chez lui indissociable de l'expression sonore). Il mène sa recherche très personnelle dans l'exploration de ce qu'on appelle de manière trop généralisée la musique spectrale. Sa pièce d'orchestre reproduit à très grande échelle une courbe plastique et gestuelle que l'on retrouve également dans Arcane pour piano. Au départ, une grande plage statique très douce et étale, la matière sonore d'abord frémit imperceptiblement, puis s'anime peu à peu s'enfle en un puissant vortex, en un tourbillon orgiaque irrésistible, où l'articulation s'accélère de plus en plus, pour atteindre à la vitesse du tournoiement en apparence de nouveau statique, comme d'une roue dont l'œil ne perçoit plus le rayons, mais seulement la transparence de la lumière dans laquelle ils se sont volatilisés. C'est une musique sensuelle, chatoyante que celle de Gaussin, parfois puissante jusqu'à une exaltante violence, qui cependant jamais ne dégénère en brutalité, une musique typiquement française, en ce qu'elle exalte l'harmonie reine, en osmose avec le timbre. Irisation -Rituel est incontestablement une page importante de la musique orchestrale française de ce temps… En résumé : la musique française se porte bien, jugez sur pièce ! Gaussin est compositeur autant que poète, et son Irisation-Rituel vaut plus que le détour : un séjour prolongé. (…) "


René BASTIAN, Le Nouvel Alsacien, Voyage musical à Metz, 3 décembre 1980

" Le néo-classicime des années 30 a sombré, le poujadisme actuel sombrera aussi mais il aura empéché d'autres compositeurs, sérieux et doués, de s'exprimer, en occupant la scène musicale avec des remakes. Irisation-Rituel d'Allain Gaussin nous réconciliait avec l'orchestre avec une musique très belle qu'il sera certainement possible de réentendre. "


Trierischer Volksfreund, Trier, Zeitgenössische Musik in Metz, Rückblick auf die "Rencontres" - 15 Uraufführungen, 27 novembre 1980

" Allain Gaussin "Irisation-Rituel" entfaltet sich in einer vier Teile durchlaufenden, stetig steigenden, von ruhig kreisenden Halbton-Bewegungen über allmählich weiter ausschwingende Gebilde bis zu einem in gewaltigem Crescendo anwachsenden dicht schillernden Klanggewebe. "

 

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